Hasty, Uneasy Music (+ Fashion) and a Bunch of Eclectic Roaring Thoughts.

dimanche 17 janvier 2010

Notre visage est un puzzle de visages morts.



'' On porte nos morts sur nos visages. ''
C'est la premiere fois que j'ai été confrontée à Christian Bolstanski, c'était dans un article du Monde (oui, je sais lire), à propos de sa rétrospective à la Maison Rouge en 2008. Ensuite, j'ai appris qu'il avait vendu sa vie en viager à un '' autiste collectionneur très bon en calcul qui a réussi à amasser une fortune grâce au casino '' (oui, ça existe, c'est Christian qui l'a dit).
Vendre sa vie, ou au moins, vendre son image. 4 caméras le filment constamment jusqu'à la fin de sa vie. L'intérêt de tout ça ? Un deal avec le matheux autiste. Parce qu'il a calculé que le Boltanski ne vivra pas bien longtemps, donc au final, la rente qu'il lui verse ne représente pas grand chose (il a calculé, il lui reste 8 ans à vivre), mais si Boltanski vit encore plus de 10 ans, le pauvre matheux se fait dépouiller, parce que ça va lui revenir cher en rentes de le filmer regarder les mouches. Ce cher C.B a donc le goût du risque (parce que son '' proprio '' n'a jamais perdu un pari de sa vie...).

Là, Boltanski est à l'honneur au Grand Palais, dans le cadre de Monumenta. Monumenta est une superbe initiative. J'avais été à la première édition, celle de 2007. Anselm Keifer y mettait son travail sur la mémoire, et sa vision de l'histoire en scène.
Cette année, c'est au tour de Christian Boltanski, au Grand Palais, mais aussi au Mac/Val (à Vitry-sur-Seine, sisi) à partir du 15 janvier. Évidemment, fidèle à Boltanski, cela traite de la mort, de son inéluctabilité, mais aussi du destin, non sans recouper ça avec la Shoah, qui reste un point fondamental de son histoire personnelle.

Ce qui est assez particulier, dans
Personnes, c'est qu'on rentre réellement dans l'œuvre. Un pas dans le Grand Palais, et déjà, nous sommes pris physiquement : Le froid. Il n'y a pas de chauffage. Et il caille dans le Grand Palais, beaucoup plus que dehors même. L'autre chose, c'est la bande son. On entre dans une atmosphère. Des battements de cœur, qui s'enchevêtrent, se superposent, s'éloignent, nous assourdissent au final. On est dans l'ambiance. Devant, des boites, superposées. En temps normal, j'aurais dit '' oh, une pyramide de boîtes de gateaux '' (oui, ok, je suis une goinfre), mais là, on ne peut que penser à des urnes funéraires. Mais le plus impressionnant reste à venir.

Un tas de vêtements de 20 mètres de haut, et 15 m de large, surmonté par une pince géante
(oui, donc normalement, je pense youpi, fête foraine, fringues...)

Mais non, on ressent tout de suite la portée de l'œuvre. La pince comme la main de Dieu, qui prend des vêtements, allégorie des âmes humaines, et les relâche, de façon totalement aléatoire, ailleurs. On est en plein dans la théorie Boltanskienne, d'après laquelle, Dieu est indifférent.

Un peu plus loin, des carrés de vêtements, disposés de façon symétrique. Comme un cimetière, mais anonyme. Bis repetita, j'aurais pensé à une brocante, un truc du genre, mais on pense immédiatement à la mort. La faute au froid, l'ambiance musicale et compagnie. Bis repetita, on retombe dans les fondamentaux du Cricri, pour lui, on ne laisse pas vraiment de trace, même si c'est ce dont nous nous soucions le plus. Et oui, l'impossibilité du souvenir.

Rien de très joyeux en somme, mais c'est quand même assez génial, d'être pris de la sorte dans l'œuvre, et de la comprendre de façon quasi-spontanée. Et puis, la fin, on est invités à contribuer nous mêmes à l'œuvre de Boltanski, en participant à sa '' bibliothèque des cœurs '', qu'il compte installer sur une île Japonaise. Son rêve est donc de référencer tous les battements des coeurs des humains, comme pour,
enfin ?, surmonter cette incapacité du souvenir.

En sortant donc, on se sent important. Parce qu'on a filé nos battements de palpitant, qu'on a compris, qu'on a vécu, et qu'on a ressenti la portée du travail d'un artiste. Après, bon, les raccourcis Shoah etc. sont assez faciles, mais on peut essayer d'appréhender l'œuvre différement, comme une réflexion plus générale sur la mémoire.

Et puis on peut dire ce qu'on veut, mais le vêtement comme allégorie de l'âme humaine, c'est quand même cool, et puis une expo, dont le PLEIN TARIF correspond à la modique somme de 4 €, pardon, mais on ne dit surtout pas non.

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